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Je vous parlais la semaine dernière de Toujane, village berbère de Tunisie. Mais il y a aussi Tamezret, Douiret, Sened, Takrouna, et bien d’autres encore. Tous ces villages berbères ont un charme particulier, celui d’un peuple qui a combattu pour sauvegarder sa culture.

 

Mais qui sont ces Berbères de Tunisie ?

berbères de tunisie

 

Il était une fois, aux sources du Maghreb…

Il y a environ 20 000 ans, une population nomade remonte le Nil, se dirige vers l’est pour s’arrêter dans la région de Gafsa, dans le Sud de l’actuelle Tunisie. On les nomme les Capsiens, du nom ancien de Gafsa : Capsa. Cette population se serait enrichie peu à peu de migrants européens de la péninsule ibérique, d’une population noire venue du Sud et de divers groupes venus de l’Est et de l’Ouest. Ce seraient les ancêtres des Berbères.

Au 1er millénaire avant J.C., cette population capsienne enrichie est devenue une multitude de peuples éparpillés sur tout un Maghreb élargi des rives atlantiques de la Mauritanie jusqu’au Nil : Garamantes, Numides, Maures, Gétules, etc… Des civilisations brillantes souvent occultées, mystérieuses, dont on découvre encore des traces.

Dès l’Antiquité, des souverains assoient leur pouvoir sur de vastes territoires, tel Massinissa, roi de la Numidie, qui règne sur une partie de l’Algérie actuelle jusqu’aux confins des territoires carthaginois.

 

Des Barbaros aux Berbères : une histoire de mots

Pour les Grecs qui, au VIIème siècle avant notre ère, établissent des colonies sur les rivages du Sud de la Méditerranée, ces populations locales sont des «Barbaros», littéralement des «non-Grecs», sans aucune connotation péjorative.

L’usage du terme se répand sous les Romains d’Afrique romaine qui qualifient de «Barbares» les Vandales envahisseurs puis les Numides s’alliant aux Vandales pour prendre Carthage.

Ce terme, déformé en «Berbère» par les historiens arabes finira par désigner l’ensemble des tribus constituant la population originelle de l’Afrique du Nord.

Quant aux Berbères, ils se dénomment eux-mêmes «Imazighen» (Amazigh au singulier), ce qui signifie : les « hommes libres ».

 

Au fil des invasions, au fil des religions

Tout au long de l’Antiquité, les Berbères tentent de maintenir leur indépendance face à la conquête romaine, aux invasions des Vandales et aux incursions des Byzantins. Le sens de la liberté, mais aussi toute une civilisation raffinée, lentement et minutieusement élaborée, nourrissent cette résistance farouche. Peu à peu, les tribus berbères du Sud tunisien reprennent leurs droits.

Durant la même période, certains clans berbères, païens, se convertissent au judaïsme puis au christianisme.

Mais l’histoire berbère va prendre un tournant décisif. En 647, les armées arabo-musulmanes lancent un premier raid contre l’actuelle Tunisie. La résistance berbère, menée par Koceila, chef rebelle chrétien, et la Kahena, une reine de confession juive, ne suffira pas. Au début du VIIIème siècle, les combattants de l’Islam achèvent la conquête du Maghreb.

Progressivement, les Berbères embrassent la religion des vainqueurs. Les tribus du Sud participent même aux conquêtes du Maghreb extrême et de l’Espagne.

Le succès de l’arabisation sera plus inégal. Important dans les villes et les plaines, il est faible sur les hauteurs où de nombreuses communautés se sont retranchées. Unis par cette résistance et une même culture, les Berbères vont toutefois encore connaître d’autres divisions. Un éclatement en mosaïques de tribus dont la rivalité s’estompe peu à peu devant l’émergence d’un Etat national tunisien.

 

Aujourd’hui, les Berbères de Tunisie

A  l’indépendance, l’état a voulu unir et homogénéiser les Tunisiens, certainement pour éviter certaines revendications séparatistes possibles. L’accent a été mis sur l’arabité et l’islamité de la Tunisie, essentiellement à travers l’école où la langue berbère était, pas seulement non enseignée, mais même interdite.

Aujourd’hui, moins de 1% de la population tunisienne se proclame berbère. Et sur ce tout petit nombre, très peu parlent encore le berbère. Il est possible que la Révolution tunisienne change ces données, en permettant à la culture berbère de retrouver ses droits.

Les populations berbères sont de nos jours encore essentiellement retranchées sur les hauteurs, dans des lieux peu accessibles. On les retrouve en majorité dans le Sud-Est du pays, dans les montagnes du Dahar, en habitat troglodyte ou dans les villages de crête. Mais on en retrouve aussi à Djerba, dans quelques villages isolés sur les monts au Sud de Tunis, dans la région de Kebili et de Tozeur, du côté de Gafsa et le long de la frontière avec l’Algérie.

Si vous passez dans le Sud de la Tunisie, que vous avez envie de découvrir un peu plus la culture berbère, arrêtez-vous au petit musée de Tamezret, à une dizaine de kilomètres de Matmata ancienne. Mongi, son fondateur et propriétaire, saura vous en parler pendant des heures en vous rendant cette culture vivante.

Et vous, quels villages berbères de Tunisie connaissez-vous ?