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Les régions de Tataouine et Beni-Kheddache se distinguent par une particularité bien spécifique : les Ksour

Ces édifices, marquant l’empreinte de l’homme dans le paysage, occupent des sites très diversifiés à partir des sommets du Djebel jusqu’à la plaine de la Jeffara. Cette diversité est intimement liée à l’histoire du peuplement de ces régions et de leur évolution économique et sociale. Aux Ksour se rattache toute une civilisation rurale qui a marqué pour plusieurs siècles l’ensemble de la Tunisie du Sud-Est.

 

Le Ksar (Ksour au pluriel) correspond en premier lieu à un grenier. Certains Ksour sont appelés Kalâa (forteresse) évoquant un rôle militaire. Il s’agit d’un ensemble de ghorfas (cellules) disposées en un ou plusieurs étages et qui ouvrent toutes sur une place centrale, la cour du Ksar. De l’extérieur, le mur, sans aucune ouverture à l’exception de la porte, se présente avec des hauteurs importantes pouvant atteindre 10 m dans le cas de certains Ksour, et évoque ainsi l’aspect de forteresse.

Partout où les Ksour ont été placés, ils sont en intégration parfaite dans le milieu naturel et l’environnement de la région. Ainsi, le choix des sites pour l’installation des ksour a-t-il toujours été effectué en fonction de l’exploitation des possibilités offertes par le relief de la crête jusqu’à la plaine, tout en respectant l’environnement. Aucun Ksar n’est implanté dans une zone inondable. Sur les crêtes, les Ksour sont difficiles à détecter de loin puisqu’ils épousent la structure et la couleur du relief environnant.

Si certains Ksour ont été aujourd’hui transformés en boutiques ou en hôtels, on n’y stockait traditionnellement que les réserves de grains, d’olives, les outils aratoires et les tentes, hors des périodes d’emploi. Car on passait en fait le plus clair de l’année en transhumance, avec le troupeau, vers les zones vivifiées par la pluie ou, s’il le fallait, en émigration au Nord du pays. Mais on se retrouvait l’été, auprès des terres de culture, de ces greniers qui portent le nom de lignage, de la tribu, point d’ancrage sur le territoire, avec le tombeau du petit saint local qui est venu, dit-on, enseigner l’Islam aux ancêtres.

Ces « châteaux » ont moins été construits pour se défendre que pour garder à part, et en sécurité, le produit d’années d’abondance, des ressources en vue de périodes de sécheresse récurrentes.

Le Ksar a dû évoluer progressivement à travers l’Histoire pour occuper à chaque période une place dans la vie de la région. Il est aisé d’observer une descente progressive des Ksour de leurs sites défensifs perchés sur des buttes, éperons et pitons difficilement accessibles à des éminences montagneuses plus facilement accessibles et enfin aux plaines.

 

1. Les Ksour citadelle ou Kalâa

Les Ksour citadelle ou Kalâa occupent les sommets plats de buttes totalement détachées de la surface du plateau ou sont construits sur des éperons rattachés par des isthmes étroits disposés en creux et faciles à contrôler. Ils dominent, en les surplombant, des villages avec des habitations troglodytiques et des huileries souterraines. Les Kalâa ont servi comme lieu de refuge aux habitants des villages lors d’ attaques.

Les Ksour citadelle datent pour les plus anciens, d’après les inscriptions trouvée sur les murs des portes et des ghorfas, de la fin du 5ème siècle de l’hégire / 11ème siècle de l’ère chrétienne. Ceci coïncide avec le déferlement des vagues de l’invasion des tribus hilaliennes en provenance de la Haute Égypte. Il s’agit d’une grande période d’instabilité qui caractérise au moyen-âge tout l’ensemble de l’Ifriquia.

Cependant, il n’est pas exclu que les Ksour citadelle soient antérieurs à cette période et que les dates découvertes coïncident simplement avec une époque de mise en état et de réfection suite à un regain d’intérêt lié à la conjoncture de l’invasion hilalienne et à l’installation des tribus bédouines autour des villages.

Ils ont ainsi permis aux Berbères de Douiret, Chenini et Guermessa de se maintenir tout en établissant des relations de clientèle et de protection avec les tribus arabes. Les autres Ksour ont été pratiquement encerclés par les tribus arabe et ont fini par se transformer en simples greniers avec l’abandon des villages troglodytiques. Certains ont été gagnés par l’arabisation, d’autres ont été complètement abandonnés.

Lisez mon article Chenini, Douiret et Guermessa, ksour citadelle pour découvrir ces 3 villages.

ksar douiret

 Le ksar de Douiret domine le village…

 

2. Les Ksour de montagne

Les Ksour de montagne sont à vocation essentiellement agricole et dominent des dépressions fertiles et des plaines. Plus facilement accessibles que les Ksour citadelle, mais toujours en montagne, ils gardent un certain caractère défensif, moins important toutefois. Plus d’association d’ailleurs avec un habitat troglodytique ou une structure villageoise.

Les Ksour de montagne se sont développés il y environ 3 à 4 siècles. Ksar Ouled Soltane a été construit  il y a environ 400 ans, Ksar Jouamaa il y a 250 ans. Ce type de Ksour est le plus souvent l’œuvre de tribus arabes qui utilisaient auparavant les Ksour de leurs protégés berbères pour l’engrangement.

ksar gattoufa

 Ksar Gattoufa

 

3. Les Ksour de plaine

Les Ksour de plaine marquent une nouvelle étape importante. C’est la dernière phase dans l’évolution historique des ksour dans leur descente progressive des crêtes vers la plaine. Le protectorat français a encourage l’apparition puis la généralisation des Ksour de plaine. Un nouveau mode d’occupation de l’espace est donc apparu, avec un intérêt accru accordés aux centres urbains créés (Ben Guardane, Medenine, Zarzis et Tataouine).

Ces Ksour sont donc de création récente. Sans contrainte topographique de sites, ils occupent un espace vaste qui peut atteindre un hectare. Ils se développent le plus souvent avec un rez-de-chaussé et un seul étage. Il a essentiellement une fonction de grenier. Certains se sont toutefois transformés en centres urbains, comme Médenine, Metameur et Zarzis.

ksar metameurKsar Metameur