« Tunisie, 1986. Apprenant la mort de sa mère, une jeune femme, Rym, revient dans son village après quinze ans d’absence. Mais les habitants n’ont pas oublié qu’elle a fui quand elle avait à peine dix-huit ans, avec un coopérant français. N’a-t-elle pas trahi les siens en épousant un chrétien ? Ne s’est-elle pas retournée contre eux, provoquant ainsi la maladie de sa mère, et peut-être sa mort ? »
FIN. Je viens de dévorer ce livre : La Retournée de Fawzia Zouari. Une passionnante escapade dans la Tunisie rurale de 1986 que l’auteur nous fait découvrir en toute subtilité. Un roman à lire ou à relire avec l’oeil de la Tunisie nouvelle pour comprendre en profondeur cette Tunisie méconnue finalement toujours actuelle, empêtrée entre traditions et modernité.
Curieux d’en savoir plus ? Lisez la suite…
La Retournée de Fawzia Zouari
Une vie de village dans la Tunisie rurale de 1986
Le village, c’est Ebba.
« Nous roulons depuis bientôt quatre heures. Mon village est à l’intérieur des terres, non loin de l’Algérie, et il arrive que les paysans s’interpellent par-dessus la frontière dans le même dialecte, à travers les mêmes chants, portés par des espoirs identiques. Ici, la terre est si fertile, le blé d’un calibre si parfait, que l’on appelait jadis Ebba le « grenier de Rome ». […]
Au dernier tournant, la vallée apparaît, inondée de lumière, frémissant sous la danse du vent. Le minaret et la coupole de Sidi Misouni surgissent au loin, deux colombes suspendues dans le silence d’un ciel azur. »
Une première description qui donne envie de faire le voyage avec Rym. De découvrir ce village perdu dans la campagne, au pied des ruines puniques de Tuburbus, forcément paisible sous le ciel bleu de Tunisie, où le temps s’écoule inlassablement au rythme des saisons…
Dès l’arrivée, tout comme Rym, nous sommes plongés dans l’envers du décor. Un village à la vie de village, enfermé sur lui-même, où chacun connait tout le monde, épie tout le monde. Une vie qui s’égrène au fil des histoires de famille, des histoires d’héritage, des histoires de voisinage, des histoires de terres, des histoires de djinns et de marabouts, de croyances ancestrales.
Ni le pays des origines, ni le pays d’accueil attendu
C’est dans ce village que revient Rym après quinze années de France.
Un village qui n’est plus celui qu’elle a quitté. Parce que quinze années se sont écoulées. Parce qu’elle n’a plus les mêmes yeux d’enfant ni de la toute jeune adulte qu’elle était lorsqu’elle a fui le pays.
Un village qui n’est pas non plus celui qu’elle espérait. Parce qu’elle est devenue l’étrangère, celle par qui le scandale est arrivé. Parce qu’elle ne se plie pas aux lois du village et qu’elle bouscule l’ordre établi.
Ni d’ici, ni d’ailleurs. Le statut inconfortable que chaque émigré reconnaitra.
La visite du Président Bourguiba
Un autre évènement secoue le village : la visite attendue du Président Bourguiba à l’approche des élections.
Une anecdote ? Non !
Non, parce que cette venue annoncée dès le début est le fil conducteur, installant un suspens grandissant jusqu’aux dernières pages.
Non, parce qu’une visite présidentielle ne doit laisser aucune place au hasard. Réglementée depuis la capitale, elle est peu compatible avec les préoccupations des villageois et leurs comportements imprévisibles – ou trop prévisibles. Un vrai casse-tête pour les autorités !
Non, parce que « le progrès et la civilisation » sont en jeu. Route nationale, préservation d’un site antique, respect des traditions : qui va « gagner » ?
Non, parce que sous le couvert d’une « banale » visite présidentielle, l’auteur nous dévoile tout en subtilité les dessous de la politique sous Bourguiba.
Fawzia Zouari : un auteur, un roman au goût de vécu
321 pages qui se lisent comme un feuilleton aux multiples rebondissements. Un style à la fois léger et profond. Un roman émouvant qui sent le vécu.
Mais qui est Fawzia Zouari ? Direction Wikipedia :
Fawzia Zouari, née au Kef, est une écrivaine et journaliste tunisienne.
Docteur en littérature française et comparée de la Sorbonne, Zouari vit à Paris depuis 1979. Elle travaille durant dix ans à l’Institut du monde arabe — à différents postes dont celui de rédactrice du magazine Qantara1 — avant de devenir journaliste à l’hebdomadaire Jeune Afrique en 19961.
Peu de choses sur sa vie personnelle. Je parcours sur le web les résumés de ses livres pour en découvrir davantage. On y retrouve des thèmes communs : quête de l’identité, traumatisme de l’exil, conditions de la femme arabe, rencontre des cultures.
Des romans : Ce pays dont je meurs ; La deuxième épouse ; J’ai épousé un français
mais aussi des essais : Ce voile qui déchire la France ; Le voile islamique
Ils m’ont donné envie. J’en lirai d’autres, c’est sûr…
Avez-vous lu La Retournée ? D’autres de Fawzia Zaouari ? Racontez-moi dans les commentaires…
C’est un livre qui m’intéresse beaucoup tiens. Je pense que je vais le lire prochainement afin, comme tu le dis si bien, de découvrir cette Tunisie rurale 🙂
Ca te fera retrouver un peu de ta Tunisie, au loin dans ton Japon actuel 😉 Bonne prochaine lecture Aala !