Chenini, Douiret et Guermessa : 3 ksour parmi les plus anciens, les ksour citadelle, de véritables forteresses surplombant le village aux maisons troglodytes.
De loin, les villages pourraient passer inaperçus, nichés dans les plis et replis de la montagne. Seule la mosquée les trahit, d’un blanc immaculé parmi les roches rougeoyantes, ocres et jaunes.
Toute une histoire, un patrimoine berbère qui s’envolent avec le départ des habitants et les anciens qui disparaissent. Toute une histoire, un patrimoine que quelques associations locales et des jeunes tentent de sauver. A découvrir absolument pendant qu’il est encore temps…
Les ksour citadelle
Un ksar, toute une histoire, un patrimoine berbère…
Qu’est-ce qu’un ksar citadelle (ksour au pluriel) ? Direction Wikipedia pour une brève explication :
Le ksar est un grenier constitué de cellules d’engrangement, appelées ghorfas, à l’usage d’une ou de plusieurs tribus. […]
Les ksour citadelle, ou kalâa (forteresse), ont clairement une vocation défensive. Il est difficile d’y accéder et de les identifier de loin car ils sont haut perchés sur des reliefs dans lesquels ils se fondent du fait de leur structure et couleur. Les villages, des habitations troglodytiques avec leurs huileries souterraines, sont situés en aval. Les plus anciennes inscriptions trouvées sur les murs des ghorfas remontent à la période des invasions hilaliennes mais rien n’empêche de penser que leur construction puisse être antérieure.
Pour une explication approfondie, je vous renvoie vers mon article « Les Ksour de la Tunisie du Sud-Est ».
Des villages devenus fantômes
A l’époque de l’Indépendance, tout à sa logique d’édification d’un Etat moderne, le président Bourguiba est venu ici pour « inviter » les populations de ces grottes séculaires à descendre habiter dans les villes nouvelles qu’il a fait créer.
Alors, dans les années 1970, les Berbères ont quitté leurs villages de crête pour vivre dans le confort moderne de Tataouine ou de ces nouveaux villages. Ou pour aller travailler en France qui quémandait de la main d’œuvre bon marché. Seuls quelques irréductibles sont restés.
Aujourd’hui, certains regrettent « le bon vieux temps », l’entraide d’antan et le confort thermique des troglodytes. D’en bas, ils regardent, nostalgiques, les hameaux des jours anciens qui se dressent encore devant eux. D’autres se battent pour que la vie y continue ou renaisse, au moins à travers le tourisme.
Suivez-moi pour un tour des trois plus grands ksour citadelle…
Chenini
Chenini, c’est le plus connu des 3 ksour citadelle. Il fait partie de tous les circuits et excursions à partir de Djerba. Le midi, bus et 4×4 stationnent au pied du village pour déjeuner dans les deux grands restaurants touristiques. Une visite rapide et le village reprend le cours normal de sa vie…
Chenini, le seul ksar citadelle encore habité
Pour autant, et même si comme moi vous fuyez les touristes, Chenini mérite une visite, et tout d’abord, parce que c’est le seul des 3 ksour citadelle encore habité. Entre 500 et 1000 personnes ont résisté à l’appel de la plaine. Il y a même une école primaire. C’est un village animé, mêlant traditions et antennes paraboliques, mais pour combien de temps encore…
Pour découvrir Chenini, je vous conseille d’y passer une nuit, au Dar Kenza, un gîte et restaurant troglodytes aménagés par un natif du pays. Situé à flanc de montagne parmi les habitations, vous y serez totalement à l’écart des flots touristiques du midi.
Vous aurez ainsi tout loisir de vous balader dans les ruelles en terrasses, d’y rencontrer les habitants à pied ou à dos d’âne, de grimper jusqu’au ksar ou jusqu’à la mosquée aux 7 dormants. Adressez-vous au Dar Kenza pour une visite accompagnée ou pour une randonnée vers Guermessa ou Douiret.
Douiret
Tant Chenini est lové dans un cirque, tant Douiret s’ouvre sur un panorama désertique et montagneux.
Le ksar de Douiret vu de la résidence
Douiret était une ville prospère à la veille du protectorat, notamment grâce au commerce caravanier. Avant l’Indépendance, il y avait encore des magasins, des centres de service, un petit hôpital de compagne. Aujourd’hui, Douiret n’est plus qu’un tas de vestiges vertigineux qui s’éboulent sous le poids des années. Mais elle se dresse toujours, fière, même si les milliers d’habitants l’ont désertée. Seules deux familles de bergers résistent…
Après avoir dépassé la Douiret nouvelle, on découvre le cimetière jonché de marabouts et l’auberge de jeunesse qui remplace l’école primaire. C’est alors que la grandeur de l’ancienne Douiret se révèle. Des habitations alignées en flanc de montagne sur des niveaux successifs, dominées par le ksar. Un vrai défi architectural !
Pour visiter Douiret, il faut simplement s’y perdre, emprunter les ruelles, pénétrer dans les maisons abandonnées, mosquées et huileries souterraines, grimper encore et encore. Ou randonner, accompagné, jusqu’à une oasis, Douiret ou Guermessa. Une nuit s’impose.
- soit à la résidence Douiret gérée par une association locale qui emploie les jeunes du village, où vous serez accueilli par deux jeunes femmes, Latifah et sa soeur.
- soit au gîte de Raouf, des maisons que Raouf et ses frères ont retapées en un gîte accueillant.
Guermessa
Perchée plus au nord, Guermessa fut aussi pendant des siècles une grande cité berbère. Aujourd’hui, elle est totalement désertée par ses habitants et rares sont les voyageurs qui s’y rendent.
Guermessa, un vrai nid d’aigle !
Il faut dire que le sentier pour accéder au haut du village est difficile et escarpé. Un vrai nid d’aigle ! Mais quelle vue panoramique du haut de cet éperon rocheux ! Le site, au paysage sauvage, est l’un des plus beaux de la région.
Guermessa, c’est deux pitons à pic qui dominent la plaine de 300 m, reliés par une « passerelle » rocheuse. Comme Chenini, un village construit à flanc de montagne et séparé en son centre par une mosquée blanche.
Chenini, Douiret et Guermessa à votre rythme
La visite de Chenini est proposée dans tous les circuits du Sud tunisien et dans les excursions à partir de votre hôtel à Djerba ou Zarzis. Mais ce n’est qu’un simple aperçu, le temps d’un déjeuner. Vous aurez peu de temps pour vous évader du groupe et arpenter quelques ruelles.
Si vous souhaitez voir également Douiret et Guermessa, si vous aimez prendre le temps de la rencontre et de la découverte, voici quelques alternatives :
- Les circuits à la carte proposés par quelques agences locales
- En voiture personnelle ou de location
- A pied ou à dos d’âne sur les sentiers de bergers. Des randonnées d’une demi-journée ou d’une journée sont proposées par des gens du village (renseignements auprès des hébergements). Il est même possible d’accompagner un berger avec son troupeau.
Pour des randonnées plus longues avec logement en gîte, chez l’habitant ou en bivouac, adressez-vous à des agences de voyage locales. - A cheval ou en VTT via des agences de voyage locales
Je vous souhaite de belles découvertes et de riches rencontres. Venez nous raconter à votre retour !
C’est fou et triste à la fois. Que des cités séculaires se dépeuplent du jour au lendemain… Au moins, on n’est pas importuné par le bruit !
Oui, et c’est aussi un mode de vie séculaire qui disparaît… et un nouveau qui se crée, plus adapté à la vie actuelle.
à guermessa j’ai perdu mon dernier rêve…
Quelqu’un le retrouvera certainement et le poursuivra…
C’est magique le paysage des endroits inoubliables