Plus encore que la situation quotidienne en Tunisie, la guerre dans le pays voisin, la Libye, semble être la plus grande crainte des voyageurs.
Comme toujours, de loin, il est difficile de faire la part des choses entre toutes les informations dont les médias nous inondent.
Cet article a pour but de clarifier les choses. Comme d’habitude, sans langue de bois !
Les faits à la frontières
2 points de frontières sont ouverts entre la Libye et la Tunisie :
- Ras Jedir, sur la côte Méditerranée. C’est par ce poste frontière, le plus important, que la plupart des réfugiés étrangers sont passés en Tunisie. Aujourd’hui, ce sont essentiellement des familles libyennes qui passent la frontière, encore en grand nombre (1 600 personnes hier). La situation à la frontière est calme et le flux des passages se déroule normalement.
- Wazen / Dehiba, 200 km plus au Sud. De violents combats se déroulent actuellement dans les montagnes du côté libyen, à quelques kilomètres de ce point de passage de la frontière. Plusieurs obus libyens sont tombés du côté tunisien, non intentionnellement. Ils mettent cependant en danger les habitants de la petite ville tunisienne de Dehiba. Lors des accalmies de combat, de nombreux Libyens franchissent la frontière pour se réfugier en Tunisie.
Les forces armées nationales qui opèrent dans le cadre d’une coordination avec la garde nationale maîtrisent la situation, tout au long des frontières avec la Libye. Des rondes communes permanentes sont organisées afin de protéger le territoire tunisien des conséquences des combats qui se déroulent entre les deux parties du conflit en Libye.
Les distances avec vos lieux de vacances
Ras Jedir est située à 80 km de Zarzis, plus de 100 km de Djerba. Pour Dehiba, rajoutez 200 km.
Lors de circuits ou d’excursions, vous pouvez passer par Tataouine, à 100 km de Ras Jedir et 130 km de Dehiba.
Les incursions dans le Sahara, que ce soit pour une nuit à Ksar Ghilane ou Douz, ou en méharée, sont encore plus éloignées des frontières. Le lieu le plus proche où vous pouvez passer dans le Sahara est Ksar Ghilane, à 100 km de Tataouine.
Les risques pour les voyageurs
Aucun !
Les combats se déroulent sur le sol libyen. Même si des obus sont tombés juste à la frontière côté Tunisie, la Tunisie n’est en aucun cas visée. Pas plus que les voyageurs étrangers en Tunisie.
Les réfugiés, étrangers ou libyens, ne représentent aucun danger non plus.
Ils sont pris en charge dès leur arrivée en Tunisie, dans des campements installés près des frontières. Tous les soins nécessaires leur sont donnés.
Les Tunisiens font preuve d’une remarquable solidarité auprès des familles libyennes, en attente de jours meilleurs pour retourner dans leur pays. Ils s’organisent spontanément pour leur offrir des hébergements dans la Tunisie entière et toute l’aide nécessaire. Des maisons individuelles, des auberges de jeunesse ou autres établissements, ont été mis à leur disposition. Les enfants sont scolarisés.
Beaucoup de familles sont installées à Tataouine et environs. Si vous vous rendez dans cette région, vous y trouverez une effervescence particulière avec beaucoup de monde pour une si petite ville. Mais aucune insécurité. Faites juste attention à la conduite singulière des Libyens, habitués à d’immenses routes désertes sur lesquels ils roulent extrêmement vite…
Ces derniers jours, plus de 1 000 libyens sont arrivés à Douz. Ils sont maintenant tous hébergés.
On me racontait hier qu’un commerçant du souk de Douz avait refusé d’être payé pour la nourriture que venait acheter une femme libyenne. Émue jusqu’aux larmes, cette femme regrettait que les Tunisiens étaient souvent mal accueillis en Libye.
Le témoignage d’une Française à Djerba
Comme Djerba est le lieu de villégiature le plus proche de la frontière libyenne et suscite le plus de questions, j’ai interrogé pour vous Olivia, une amie française habitant et travaillant à Djerba. Voici son témoignage :
– Olivia, est-ce que, habitant à Djerba, tu te sens en insécurité par rapport à la situation en Libye et à la frontière, proche ?
J’habite et travaille à Djerba depuis presque 10 ans. La vie ici suit son cours tout à fait normalement et la frontière nous paraît bien loin. Bien sûr, il m’arrive d’y penser. Nous sommes quand même proches de la Libye et un dérapage possible de Khaddafi est forcément dans tous les esprits. Mais je crois qu’actuellement, il a beaucoup de problèmes à gérer sur son propre sol et n’a pas intérêt à commettre des actes qui toucheraient ses voisins, encore moins des européens. Les combats actuellement sont très proches du poste frontière de Dhibba, région montagneuse du grand sud tunisien. L’armée tunisienne et la Garde Nationale sont massivement mobilisées sur place pour assurer la protection de la frontière, de la population tunisienne proche, et surtout des nombreux libyens qui fuient les zones de combat avec leurs familles. En fait ici au quotidien personne n’en parle. Les Tunisiens continuent à plaisanter avec Zanga Zanga, cette chanson qui plagie le fameux discours surréaliste que Khaddafi a fait il y a quelques semaines. Les agences continuent à assurer normalement leurs excursions vers le Sud et les consignes du Quai d’Orsay n’ont pas été revues jusqu’à maintenant. L’île, traditionnellement connue pour sa douceur de vivre et son calme, continue heureusement à être un endroit où il fait bon vivre malgré les évènements.
– Les avions de l’Otan passent-ils au-dessus de l’ile ? Est-ce qu’on les voit ?
Jusqu’à aujourd’hui, j’avoue n’avoir vu aucun avion militaire passer au-dessus de nos têtes. Seul un hélicoptère de l’armée tunisienne survole l’île de temps en temps, plus je pense pour rassurer la population qu’autre chose.
– Est-ce qu’il y a encore des réfugiés dans les hôtels ?
Il n’y a plus de réfugiés dans les hôtels depuis bien longtemps. Cette situation exceptionnelle, largement médiatisée fin février et début mars dans les médias européens, a duré une dizaine de jours tout au plus. L’île, de part sa situation géographique, étant l’aéroport le plus proche de la frontière, est devenu de fait le point d’évacuation des nombreux travailleurs de nationalités différentes qui travaillaient en Libye, principalement pour des compagnies pétrolières. Les plus chanceux (ceux dont la société ou le pays a pris en charge les frais d’évacuation) ont pu attendre leur rapatriement dans les hôtels. C’est le cas de nombreux chinois ou turcs qui ont été hébergés dans quelques hôtels de l’île.
– Y a-t-il encore des réfugiés à l’aéroport ?
Non ! Comme pour la question précédente, il y a eu c’est vrai des réfugiés en attente de vols de rapatriement, situation qui a duré à peu près deux semaines. Pour les Egyptiens notamment qui étaient très nombreux, l’évacuation s’est faite directement du poste frontière de Ras es Jdir vers l’aéroport de Djerba où ils ont du attendre parfois plusieurs jours pour pouvoir prendre un vol. Grâce à la formidable mobilisation des tunisiens (notamment des compagnies aériennes qui ont effectué bénévolement des rotations sur Le Caire, mais aussi des agences de voyage qui ont prêté leur bus, des hôteliers qui ont distribué des repas à l’aéroport et des simples bénévoles qui sont venus spontanément prêter main forte), cet exode massif s’est déroulé dans un calme étonnant malgré l’afflux important de réfugiés. Il faut également souligner que ces réfugiés étaient transférés directement à l’aéroport et qu’il n’y a jamais eu de camps de réfugiés sur Djerba comme j’ai pu le lire ou l’entendre.
– Y a-t-il des risques, d’après toi, à venir à Djerba ?
Pour parler franchement, non. Il n’y a pas plus de risques à venir à Djerba qu’à partir n’importe où ailleurs. Il est d’ailleurs curieux que les gens soient venus si nombreux lorsque la Tunisie était notoirement connue pour être une dictature et qu’ils hésitent maintenant à voyager dans un pays qui vient de gagner sa liberté. Les touristes qui résident actuellement sur l’île effectuent leur séjour dans des conditions tout à fait normales, voire même plus car les Tunisiens sont aux petits soins pour eux. Le seul risque que l’on courait ces jours-ci, c’était de subir une tempête de sable !
Pour encore plus de lecture, un article de l’Alsace.fr : La Libye, trop près, trop loin
N’hésitez pas à noter, dans les commentaires, toutes les questions que vous vous posez encore !
Mise à jour : Peut-on voyager sans risque en Tunisie ?
bravo pour votre blog, très bien écrit et bien utile, j’espère qu’il sera lu par un maximum de monde.
Pour ma part je n’ai aucune crainte de venir en tunisie, jy serai d’ailleurs a partir du 15 juin pour quelques semaines.
A bientot
Merci pour vos encouragements !
Votre commentaire, comme celui des autres lecteurs, participe à donner vie à ce blog, à le faire connaitre et à apporter un autre regard sur la Tunisie à tous ceux qui ont envie de la découvrir.
Bon séjour en Tunisie !
Christine
bonjour,
Votre texte est il encore valable aujourd’hui ? en vous remerciant
Bonjour Tibbe,
Oui, ce texte est encore valable aujourd’hui. Il est toujours fortement déconseillé de s’approcher des frontières libyennes mais vous pouvez aller sans problème à Djerba, Zarzis, Tataouine, Ksar Ghilane, Douz, etc… Je vous conseille la lecture de mon article spécial Sud tunisien et de ses commentaires, plus récents : http://escapade-tunisie.com/coup-de-gueule-la-securite-insecurite-dans-le-sud-tunisien-en-5-points/
Bon séjour en Tunisie et donnez-nous des nouvelles à votre retour 🙂